Jusqu'au mois de mai, le mot "rigueur" était tabou à droite. Puis les langues se sont déliées, d'abord en dehors du gouvernement. Et François Fillon lui-même a fini par utiliser le terme si honni... Retour sur des mois de tergiversations.
Temps 1: La majorité fait bloc contre la rigueur
6 mars 2008 - Nicolas Sarkozy, Président de la République
"Je ne crois pas aux plans de rigueur. Ils ne mènent à rien."
19 août 2008 - Éric Woerth, ministre du Budget
"C'est une politique de rigueur dont nous ne voulons pas."
8 mai 2010 - Henri Guaino, conseiller du chef de l'État
"La "rigueur", c'est l'ajustement économique par la baisse du pouvoir d'achat. Ce n'est pas du tout la politique du président de la République et du gouvernement."
8 mai 2010 - François Fillon,
Premier ministre
La France est "loin d'un plan de rigueur" qui "n'existe pas et qui n'existera pas", "La rigueur, c'est quand on réduit les dépenses et qu'on augmente les impôts. Nous, nous avons choisi, le
plan de relance mis à part, de réduire la pression fiscale lorsque c'était possible et de diminuer la dépense publique. Nous sommes donc dans une gestion qui n'est pas celle d'un plan de
rigueur."
10 mai 2010 - Frédéric Lefebvre, porte-parole de l'UMP
"En langage économique, le mot rigueur, ça veut dire une augmentation généralisée des impôts. Ça a été le cas avec M. Mauroy, M. Barre, et M. Juppé dans le passé."
Temps 2 : La droite se résigne, le gouvernement nie toujours
10 mai 2010 - Jean-François Copé,
président du groupe UMP à l'Assemblée nationale
"Moi, le mot que j'utilise c'est le mot de rigueur, après tout on n'est pas là pour se battre sur les mots."
28 juin 2010 - Jean-François Copé, président du groupe UMP à l'Assemblée nationale
"Oui, on y est.[dans la rigueur] La crise grecque a servi de révélateur brutal. C'est comme si l'addition de trente années de petites reculades et de petites lâchetés arrivait sur la table et
commandait d'être réglée immédiatement."... "Je revendique d'avoir été le premier à dire qu'il fallait une politique de rigueur."
30 juin 2010 -
Alain Juppé, ancien Premier ministre
"Aussi les circonlocutions autour des mots rigueur, austérité, responsabilité me paraissaient-elles un peu dérisoires."
Temps 3 : le gouvernement finit lui aussi par accepter
30 juin 2010 - François Baroin, ministre du Budget
"Ce n'est pas un gros mot. Rigueur ou pas rigueur, autant disserter sur le sexe des anges."
4 juillet 2010 - Christine Lagarde,
ministre de l'Économie
La France mène une politique de "rilance". "Relance ou rigueur, ce n'est pas un choix, ce n'est pas un noeud gordien pour moi". Entre rigueur et relance, la "rilance" est un "subtil dosage
(...) qui consiste en réalité à réduire la dépense publique là où ce sera le moins douloureux pour la perspective de relance de l'activité".
12 juillet 2010 - Nicolas Sarkozy, Président de la République
"Le mot rigueur est connoté", il s'apparente à la baisse des salaires et hausse des impôts, "je ne le ferai pas." "Ce qui ne me fait pas peur, c'est le mot rigoureux. Rigoureux, ça veut dire
qu'on revient à l'équilibre" des comptes publics.
16
juillet 2010 - François Fillon, Premier ministre
"C'est la raison pour laquelle dans tous les budgets de l'Etat, le seul qui n'est pas soumis à la rigueur, c'est le budget de l'Enseignement supérieur et de la recherche."